Dans la tête et les notes du Por [titre masqué], membre du corps diplomatique de la mission [notes masquées].Quelle étrange impression je ressent dans ce genre de moments. Moi, un humble membre de la caste de l’eau, envoyé comme attaché diplomatique sur un théâtre d’opérations militaires.
A ma descente sur la planète, le bruit des canons tonnant dans le lointain, accompagnés de quelques éclats lumineux et autres bruits d’engins tonitruant. L’air vicié, les râles d’agonies de mes camarades Shas , l’ambiance étouffante, le vacarme causé par les diverses opérations de réparations et de logistique. Ce n’est qu’une petite base et pourtant elle fourmille de vie. Une vie couplée avec un parfum de mort.
Mais parmi tout ce spectacle, je pouvais entendre et apercevoir, de près comme de loin, la formidable force que nous constituons, ainsi je me sentais également dans mon élément, et non tel un étranger qui n’aurait pas sa place.
Au-delà des missions standards confiés à un membre de la caste de l’eau, ma véritable mission était d’un ordre bien plus secret. En effet, je ne me trouve pas au sein d’une énième coalition, mais d’une coalition dont le commandement militaire a été confié au Shas’O’T’au’Q’toR , un commandant aussi respecté que sulfureux, afin d’y dresser un état des lieux de tout ce qui le concerne.
Je pourrais à la fois tarir d’éloges et de critiques ce commander, mais nous y reviendrons. Une chose particulière a attiré l’attention de mes supérieurs, et par extension celle de nos illustres guides des Aun .
Cette personne a en son commandement une unité très spéciale. Une unité de gardes d’honneur pour dignitaires de haut rang, généralement des Aun ou des Por comme votre serviteur, mais cela peut également s’étendre à des dignitaires de haut rang de toute caste.
En son sein, on y trouve des éléments d’une compétence et d’un professionnalisme à nul autre pareil. Des membres tel que le Shas'ui'Kais'O’ran'Saishen , un sergent instructeur des plus renommés, ayant eu beaucoup d’illustres Shas sous son instruction.
Embrassant pleinement l’idéologie du Tau’va , on y trouve même des Gue au sein de cette unité. Le chef de cette unité est d’ailleurs une Gue d’une trempe que nous n’avions jamais vue jusque-là. Son titre est Gue’nel’T’au’Lunsu’Lorena . Un titre qui lui fut décerné par un éthéré dont elle avait la garde. Une rare distinction, plus encore pour un humain, qui rappelle celle portée par le commander Shas’O’Ksi’m’yen’Lunsu .
J’aimerais vous faire parvenir un des divers enregistrements qui figurent parmi les documents complétant mon rapport, si vous me le permettez.
[…]
Dans le QG du Shan’al .Le Shan’al est l’essence même du Tau’va. Toutes les castes sont à l’œuvre, entre analyse et préparation des opérations. Parmi le va et vient et drones et du personnel, un petit drone de communication slalome son chemin pour trouver le commander.
Un drone qui nécessiterait bien des réparations, mais cela lui donne un côté attachant selon les Fio qui travaillent ici. Et tel un serviteur, le drone sollicite l’attention du commander, qui n’y prête pas plus d’attention que d’autres drones.
« Illustre Shas’O, un message pour vous, prononça le drone.
- Criticité et provenance du message je te prie, lui répondit le commander.
- Importance : Très Haute, Provenance : Caste des Aun. Confirmation de lecture demandée.
- Très bien. Envoie le message sur mon vox personnel et sur ma tablette de données je te prie.
- A vos ordres, commander. »
Une scène très fréquente se dessine alors autour des proches du commander dans son Shas’ar’tol . Pour ce dernier, il entendait et lisait clairement sur son canal sécurisé et sur sa projection holographique du message.
Pour les autres, ils ne pouvaient apercevoir qu’une version floutée du message apparaissant près des yeux du commander. Toujours s’adressant au drone :
« Localise Gue’nel’T’au’Lunsu’Lorena et ordonne-la de me rejoindre dans le Shas’ar’tol, prestement. »
Il lui transmit alors les données nécessaires pour le bien de la mission simpliste du drone, ce dernier s’exécutant alors sans délai.
D’un air taciturne, le commander analyse le message transmis. Tout en grommelant :
« Il faut encore que j’aie cette maudite bureaucratie dans les pattes. Encore des attachés diplomatiques, encore des éthérés. Oui, j’ai remarqué votre présence camarade Por, ainsi ne le prenez pas comme une offense. C’est à se demander si moi et mes unités faisons l’objet de fascination ou si nous faisons office de cibles d’entrainement prêtes à être touché au plein cœur par quelques fusils alignés. » s’écria le commander, le regard levé vers le plafond, vers un des hologrammes présentant les différents états des lieux de la campagne. Une formalité à comprendre pour l’élite de la caste du Feu, une œuvre complètement abstraite pour les autres.
Parmi le haut commandement des Shas et par extension celle du personnel du Shan’al, si tous n’ont pas l’expérience du commander quand il s’agit de traiter directement avec les Aun, tous étaient solidaires de ce commandeur si particulier, surtout ceux travaillant depuis longtemps avec lui.
Plus tard, Gue’nel’T’au’Lunsu’Lorena pénètre dans le QG du Shan’al, puis rejoint les membres du Shas’ar’tol accompagné du drone, qui le guide vers le commander.
Elle trouva le commander dos à elle, replongé dans ses diverses projections holographiques.
« Gue’nel’T’au’Lunsu’Lorena », s’écria le Shas’O. Faisant face et jetant un regard perçant et approbateur, se rapprochant d’elle :
« Ou plutôt devrais-je dire Lorena tout court, non ?
- Votre nom sera le mien. Enfin tout dépend quelle dose d’ennuis vous voulez avoir avec nos supérieurs », le regard répondant celui du commander.
Esquissant un sourire, il congédia le drone et de sa gestuelle, pria l’humaine de le suivre à l’écart de cette agitation.
Tandis qu’elle suivait le commandant, subrepticement elle était capable de voir l’attention que lui portait un des Por présents au sein du QG. Encore un énième rapporteur au service des Aun, pensa-t-elle. Le commander débuta :
« Vous commencez à avoir l’habitude, les informations que je m’apprête à vous communiquer sont de nature… sensible. »
Elle était également munie d’un petit projecteur holographique qui permettait aussi de projeter des informations près de ses yeux. Le commander lui transmettant ces informations, tout ce qui était clair pour elle était flou pour les autres. Les deux communiquaient alors par canal privé, filtrant aux autres toute la conversation qui s’engageait alors.
« Un corps diplomatique est en approche et devrait arriver d’ici quelques heures. Un éthéré fait naturellement parti de cette expédition. L’ensemble du Shas’ar’tol est au courant. Votre mission pour vous et votre équipe, sera d’escorter cet éthéré dans toutes ses pérégrinations.
Et comme vous le savez, le corps des Aun a normalement pour habitude de prendre des membres de leur propre caste ou bien de véritables Tau parmi les Shas comme leur garde du corps, dans des théâtres d’opérations sensibles. Dans le message, ils ont insisté sur le fait que VOUS et votre équipe soyez sa garde. C’est un immense honneur, vos résultats vous précédant. »
Tout en continuant son discours, d’un air paternaliste, les mains derrière son dos, Lorena se sentit galvanisée, fière. Elle coupa les projections holographiques et leva la tête vers le haut, au garde-à-vous. Comme si elle savait déjà les tenants et aboutissants de sa mission.
« Officiellement et pour toute la coalition, l’éthéré fait office de guide, de garant de notre succès. Pour les membres haut placés du Shas’ar’tol, nous savons que cet éthéré est également affecté pour des missions de nature plus secrète. Vous n’êtes pas étranger au fait que nos illustres Aun sont les cibles prioritaires de nos ennemis. Particulièrement chez les Gue ayant refusés d’embrasser le Tau’va, l’ennemi nommé ‘Imperium’. Ainsi votre discrétion et votre professionnalisme sera de mise.
- Naturellement, commander.
- Je viens de vous transmettre sur votre tablette tout ce dont vous avez besoin de savoir, Gue’Nel . »
Alors qu’elle se préparait mentalement à quitter le commandant. Elle remarqua un signe du commandant. Pas n’importe quel signe. Un signe de secret, de confiance. Un signe si subtil et puissant qu’il passa inaperçu. Elle comprit alors la nature des propos qui allaient suivre.
Le changement est invisible pour les personnes extérieures. De manière générale, toutes les communications et diffusions sont normalement stockées et, en fonction des habilitations de chacun, divers documents peuvent être lues.
Leurs voix sont non seulement « filtrées » du monde extérieur mais semblent être coupés de tout enregistrement externe. Un monde privé dans un monde déjà privé. Un enregistrement que ce Por encore présent dans le QG aurait rêvé de mettre la main dessus.
« Ne soyez pas nerveuse, vous commencez à avoir l’habitude ma chère. Vous savez comme vous et moi le pourquoi réel de ce corps diplomatique. L’attention est portée à mon encontre, et à la vôtre. Ainsi vous connaissez les enjeux réels de votre mission. C’est à croire que je ne pourrais jamais vous rendre assez la « monnaie de votre pièce » comme vous dites autres humains.
- Vous le faites déjà plus qu’assez pour mon équipe et moi-même, mon commandant. », admirative et enthousiaste à ce qui allait suivre.
Ainsi se poursuivait leur conversation secrète. Pendant ce temps-là, le Por fut demandé hors du QG. Il put constater de lui-même que quelque chose semblait étrange. Comme si une pièce du puzzle manquait pour compléter un rapport parfait, digne de sa caste.
Plus tard dans les quartiers privés du Por, reprenant son rapport.Une manouvre diplomatique habile, digne des miens je ne pus m’empêcher de penser. J’ai la sensation d’avoir été écarté de quelque chose des plus importants, et en même temps d’avoir été valorisé et apprécié à ma juste valeur. Un diplomate pris à son propre piège.
Ainsi je continuais mon rapport :
« L’ensemble des informations suivantes sont une synthèse de tout ce dont j’ai été habilité à consulter sur lui et cette unité, accompagné de notes plus personnelles :
Le commandeur Shas’O’T’au’Q’toR est un des commandants les plus réputés et controversés de sa génération. Un vétéran parmi les Commander, un briscard éprouvé par des années de services, des opérations périlleuses et souvent avec une logistique limitée. Et c’est en cela qu’il a toujours brillé dans ses résultats, n’hésitant pas à utiliser de tactiques questionnables et un recours massif aux auxiliaires en qui il donne de grandes responsabilités.
Plusieurs rapports font états de suspicions quant à son allégeance réelle. Si beaucoup n’ont aucun doute sur son allégeance au Tau’va, certains ont des éléments qui laisseraient à penser qu’il ait pu coopérer par le passé avec les enclaves du sombre O’Shovah, le commander Farsight (pardonnez votre serviteur pour la mention de ce nom ici et dans ce qui suit).
L’emploi massif d’auxiliaires et par extension l’existence de cette unité de garde du corps au sein de ses troupes sont une analyse à double tranchant : Une attitude altruiste et équitable avec les différents membres de l’Empire. Un exemple magnifique que beaucoup de commandeurs se devraient de suivre. Un gage donné à sa hiérarchie pour prouver son allégeance dit « discutable ».
D’un autre côté, certains questionnent l’allégeance de ces auxiliaires, étant peut-être plus fidèles à leur propre commandeur qu’en nos illustres Aun. Une attitude qui rappelle celle des hommes de O’Shovah. Ils seraient alors les yeux et oreilles de ce commandeur, voire pire si l’on en croit les rumeurs les plus folles : des espions à la solde du commandeur Farsight, une sorte de pacte ou de cadeau fait entre ces deux commandeurs.
Naturellement, votre serviteur pense que ces suppositions sont complètement aberrantes. Les différents entretiens auprès des Aun et la « remise en question » qu’ont eu les rapporteurs de ces documents, suite à ces entretiens, le prouvent tout naturellement. Mais il était en mon devoir de le mentionner, tel l’eau qui s’engouffre dans la faille. Si mes conjectures sont de nature déplacé, je prie ma hiérarchie de le faire savoir et me donner les clés de compréhension qui me manqueraient.
Je continuerais diligemment la transmission de mes rapports,
Pour le Tau’va, votre dévoué Por [titre masqué]. »